Addictions : urgence prévention et information

3 questions à Jean-Pierre Goullé

Addictions : urgence prévention et information

 


1. Un bilan toujours aussi préoccupant ?


Chaque année, le tabac et l’alcool sont respectivement responsables de 75 000 et 41 000 décès et de nombreux handicaps qui obèrent la qualité de vie de ces personnes dépendantes pour un coût social de 120 milliards d’euros.

Or, contrairement à une idée trop fréquemment répandue, les taxes perçues sur l’alcool et sur le tabac ne couvrent respectivement que 37 % et 40 % du coût
des soins prodigués aux patients alcooliques et fumeurs. En matière de cannabis, nous restons les champions européens et, paradoxalement, alors que l’on constate actuellement une diminution du nombre de consommateurs dans notre pays, le niveau d’addiction ne cesse de progresser chez les jeunes de 17 ans, passant de 18 % en 2011 à 25 % en 2017.

Signalons également les conséquences délétères de nouveaux modes de consommation comme la « beuverie express » ou l’usage de drogues d’apparition récente disponibles sur Internet. Enfin, le mésusage des écrans a des conséquences non négligeables en matière d’addiction.

2. La France mauvaise élève de l’Europe ?


Sur la base de ses enquêtes de prévalence, l’Observatoire européen des drogues et toxicomanies (OEDT) a récemment décerné un blâme à la France pour dénoncer le manque de prévention et d’information sur ces sujets dans nos programmes éducatifs. Il montre, en effet, que c’est la précocité de la consommation et sa progression régulière qui expliquent le niveau élevé de produits addictifs à l'adolescence. Ainsi, un élève sur deux en classe de sixième a expérimenté l’alcool, près d’un sur dix le tabac, et l’initiation au cannabis débute dès la classe de cinquième.

3. Quelles pistes d’amélioration ?

Les Académies ont fait des propositions.* Elles suggèrent en particulier « d’augmenter signifi-cativement les enseignements consacrés aux sciences de la vie et de la terre afin d’y intégrer, dès l’école primaire et jusqu’à l’université, une information régulière sur les dangers de ces drogues ». Il faudrait également « promouvoir des actions collectives de sensibilisation sur les risques des drogues licites et illicites, à destination prioritairement des parents, des femmes enceintes, du corps médical, des enseignants, des milieux professionnels et politiques ».


* Académie nationale de médecine, Rapport du 1.10.2019 « Consommation de drogues licites et illicites chez l’adolescent : une situation alarmante qui impose une prévention précoce »  https://www.academie-medecine.fr/wp-content/uploads/2019/10/Rapport-Drogues-et-Adolescence.pdf

Académies nationales de Pharmacie et de médecine, Communiqué du 10.3.2021 « Consultation citoyenne sur le cannabis « récréatif ». Un choix politique en conflit évident avec la santé publique » https://www.acadpharm.org/dos_public/21.2.23_GOULLE_COMMUNIQUE_BICADEMIQUE_VF.PDF