Métaux et métalloïdes en thérapeutique

3 questions à Claude Monneret


Métaux et métalloïdes en thérapeutique.


1. Traiter avec des métaux à l’ère des biomolécules, n’est-ce pas anachronique ?


Les biomolécules représentent un intérêt indéniable, mais elles ne sont pas la panacée comme on veut parfois nous le faire croire. Supprimez demain l’accès au lithium, au trioxyde d’arsenic ou encore aux dérivés du platine, et vous serez bien démuni face aux patients atteints de trouble bipolaire, de leucémie promyélocytaire aiguë ou de cancers génito-urinaires. Les métaux/métalloïdes gardent toute leur place contre certaines maladies. L’arsenic, par exemple. Outre le fait que son mécanisme d‘action est mieux connu, ce métalloïde reste prometteur dans certaines surexpressions du système immunitaire et vis-à-vis de maladies parasitaires dont on peut craindre l’extension géographique du fait du dérèglement climatique.

2. Ces médicaments commencent à dater... Peut-on vraiment parler de nouveautés ?

Les techniques modernes de dosage permettent de mettre en évidence tout dérèglement de l’homéostéasie de nombreux métaux afin d’éviter toute rupture de l’équilibre normal. C’est le cas du fer dont la surcharge intervient dans différentes pathologies comme les cancers ou les maladies neurodégénératives. On peut aujourd’hui combattre ces excédents dans certains cancers, le sein en particulier. Demain, peut-être, il suffira d’administrer de petites molécules chimiques, des chélateurs, qui piègent ce fer pour en éviter le surdosage dans la maladie de Parkinson et autres dégénérescences du système nerveux. De même, on sait que le zinc est indispensable au bon fonctionnement cellulaire mais que, à trop forte concentration, il peut se révéler pathogène, comme dans l’insuffisance rénale chronique et la maladie d’Alzheimer dont témoignent les plaques séniles (plaques amyloïdes). Les recherches en cours montrent que la chélation du zinc, comme celle du fer, pourrait être une alternative thérapeutique.


3. Faut-il miser sur les nanoparticules métalliques dans le traitement des cancers ?


C’est indéniablement un domaine d’innovation thérapeutique. L’or a un riche passé en la matière puisqu’il fut successivement préconisé pour le traitement de la tuberculose par le Professeur Pierre Pichat et l’industriel Auguste Lumière à Lyon, et contre le rhumatisme articulaire aigu par le Professeur Jacques Forestier. Il est actuellement utilisé sous forme de nanoparticules en biologie pour l’imagerie et le diagnostic. Côté traitement, les nanoparticules métalliques intéressent les chercheurs pour leur capacité à vectoriser des substances actives comme les médicaments, ou encore du fait de leurs propriétés intrinsèques de résonance de plasmon et de photothermie. Récemment, la Medtech française Nanobiotix a boosté les effets de la radiothérapie avec des nanoparticules d’hafnium dans le traitement particulièrement difficile des cancers des tissus mous. D’autres nanoparticules radio-sensibilisantes dérivées du gadolinium pourraient agir sur des métastases cérébrales. Les premiers résultats cliniques sont prometteurs en termes de faisabilité, de tolérance et d’efficacité.