Séance académique

Conférence HYGIA "La microfluidique au service de la pharmacologie", Jacques FATTACCIOLI

ACTUALITÉS THÉRAPEUTIQUES

EXPOSÉS

"Patisiran dans l'amyliodose à transthyrétine", David ADAMS

"L’inhibition de l’aminopeptidase A cérébrale : une nouvelle voie thérapeutique pour le traitement de l’hypertension arterielle", Catherine LLORENS-CORTES

"Nouveaux développements dans le traitement des migraines", Dominique VALADE

"Inhibiteurs sélectifs des tumeurs porteuses d'un transcrit NTRK : un changement de paradigme dans le traitement des tumeurs de l'enfant et de l'adulte", Daniel ORBACH

 

Séance académique

Mercredi 6 novembre 2019

 Ordre du jour

 




Conférence Hygia

« La microfluidique au service de la pharmacologie »
Dr Jacques Fattaccioli, Institut Pierre-Gilles de Gennes pour la Microfluidique, Pôle NanoSciences et MicroSystèmes UMR PASTEUR (ENS/CNRS/Sorbonne Université), Département de Chimie, École Normale Supérieure

 

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Les systèmes microfluidiques sont des dispositifs qui comportent un ensemble de composants miniaturisés autorisant l'étude et l'analyse d'échantillons chimiques ou biologiques avec des volumes faibles et un grand contrôle des conditions expérimentales. Véritables « microprocesseurs pour la biologie », ils permettent de remplacer des instruments encombrants et très coûteux. La microfluidique représente pour la biologie et la chimie une révolution semblable à celle apportée par les microprocesseurs à l'électronique et l'informatique.

Dans le domaine de l’ingénierie tissulaire et la pharmacologie, les « organes sur puces » permettent de cultiver des cellules ou des amas de cellules en contrôlant précisément leur environnement local et leurs interactions avec une grande flexibilité. Ces systèmes rendent possible la reconstitution de processus biologiques complexes associés à des parties fonctionnelles d’organes humains (alvéoles pulmonaires, vili d’intestin, etc.), qu’on ne pouvait jusqu’à présent observer que dans des modèles animaux et de façon beaucoup moins détaillée. Ces microsystèmes, pour certains commerciaux et d’autres encore en développement, ouvrent des perspectives dans le domaine du criblage de molécules actives et de leur utilisation pour une médecine plus personnalisée.

Dans cet exposé, je présenterai quelques caractéristiques importantes et générales des systèmes microfluidiques, et je détaillerai quelques exemples d’organes sur puces, disponibles sur le marché ou non, en montrant à la fois leurs avantages et leurs limites éventuelles.

 


 2-  Travaux scientifiques & professionnels

2.1 EXPOSÉS (20 min)

« Patisiran dans l’amyloïdose à transthyrétine »

Pr David Adams, APHP

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Diapositives présentées

Les amyloses héréditaires à transthyrétine (hATTR) sont des affections multisystémiques rares de transmission autosomique dominante de l’adulte, dues à des dépôts de substance amyloïde, liées à une mutation du gène de la transthyrétine (TTR ; préalbumine). Elles font partie des maladies du repliement des protéines. Elles sont responsables majoritairement d’une atteinte destructrice du système nerveux périphérique (hATTR-PN) somatique et végétatif, mais également cardiaque, oculaire, rénale. Elle est mortelle en 3-4 ans en l’absence de traitement de fonds une fois le diagnostic posé et impacte la qualité de vie.

Quatre traitements de fonds ont été mis successivement à disposition depuis 1993 pour les hATTR-PN: la transplantation hépatique (1993), le tafamidis (2012), un ARN interférent,  le patisiran (2018), un oligonucleotide antisens l’inotersen (2018).

L’ARN interférent synthétique thérapeutique patisiran a été élaboré pour s’introduire dans le cytoplasme des hépatocytes et dégrader spécifiquement les ARN messager de la TTR mutée et sauvage, réduire la libération sérique de ces protéines, la formation des dépôts amyloïdes et impacter la progression de la maladie. Les études de phase I et II ont montré une réduction rapide et majeure (> 80%) du taux des TTR sériques mutées et sauvage à la dose de 0,3 mg/kg en perfusion intraveineuse et défini un rythme de toutes les 3 semaines. L’étude multicentrique de phase III APOLLO a été positive permettant de réduire de façon significative la progression du score de neuropathie mNIS+7 par rapport au placebo. Le score final de mNIS+7 à 18 mois était inférieur à celui du score de base suggérant une amélioration de la neuropathie chez 50% des patients; de même une amélioration de la qualité de vie, de la vitesse de marche et une réduction de la dysautonomie (critères secondaires). Cette efficacité s’avère quel que soit le stade I ou 2 de la maladie, la mutation et l’âge du patient. La tolérance est excellente ; une prémédication est nécessaire pour éviter des réactions liées à la perfusion. Le patisiran a obtenu une AMM par l’EMA et la FDA, l’amélioration du service médical rendu modérée (ASMR III) par l’HAS. Avec un traitement de fonds possible pour tous les patients.

« L’inhibition de l’aminopeptidase A cérébrale : une nouvelle voie thérapeutique pour le traitement de l’hypertension artérielle »

Dr Catherine Llorens-Cortes, Directeur de Recherche classe exceptionnelle (DRCE) INSERM ; Directrice du laboratoire intitulé " Neuropeptides centraux et régulations hydrique et cardiovasculaire, Centre Interdisciplinaire de Recherche en Biologie (Inserm U1050/CNRS 7241), Collège de France

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L’hyperactivité du système rénine-angiotensine cérébral participe au développement et au maintien de l’hypertension. Nous avons montré dans ce système que l’angiotensine III formée sous l’action de l’aminopeptidase A (APA) est l’un des principaux peptides effecteurs, qui exerce un effet stimulateur tonique sur le contrôle de la pression artérielle dans différents modèles expérimentaux d’hypertension. Le RB150 renommé firibastat par l’OMS est une prodrogue d’un inhibiteur spécifique et sélectif de l’APA, l’EC33, formé de deux molécules d’EC33 reliées par un pont disulfure. Administré par voie orale, le firibastat traverse les barrières intestinale, hépatique et hémato-encéphalique, entre dans le cerveau où son pont disulfure est réduit par des réductases cérébrales pour donner naissance à deux molécules actives d’EC33. Dans le cerveau, l’EC33 inhibe l’activité de l’APA, bloque la formation de l’angiotensine III et normalise la pression artérielle chez le rat hypertendu et ceci par trois mécanismes différents : en diminuant l’activité des neurones sympathiques, en levant l’inhibition sur le baroréflexe exercée par l’angiotensine III et enfin, en diminuant la sécrétion de vasopressine, augmentant la diurèse.

La sécurité d’emploi du firibastat a été évaluée chez des volontaires sains, en administrations unique ou répétées, dans deux études cliniques de phase I (Ia et Ib). Deux études cliniques de phase II (IIa et IIb) ont ensuite été réalisées chez le patient hypertendu. Dans la première étude qui a inclus 34 patients, la collaboration entre les cliniciens de quatre centres d’hypertension artérielle en France et mon laboratoire a confirmé la sécurité d’emploi du firibastat et apporté les premières données de son efficacité chez des patients hypertendus. Les résultats montrent un meilleur contrôle de la pression artérielle systolique avec le firibastat que le placebo au bout d’un mois de traitement, bien que statistiquement non significatif, dû à la taille réduite de l’effectif et de l’hypertension artérielle modérée des patients. Ces résultats encourageants ont donné le feu vert à la seconde étude de phase IIb NEW HOPE réalisée aux USA. Elle a confirmé l’efficacité du firibrastat chez 254 patients hypertendus en surpoids à haut risque cardiovasculaire, avec une baisse significative de la pression artérielle systolique de près de 10 mmHg après deux mois de traitement, y compris chez les patients afro-américains qui ont le plus souvent une hypertension résistante aux traitements actuellement proposés.

Ces travaux suggèrent que le firibastat pourrait constituer le chef de file d’une nouvelle classe d’agents antihypertenseurs qui cible le système rénine-angiotensine cérébral, pour le traitement de l’hypertension résistante

« Nouveaux développements dans le traitement des migraines »

Dr Dominique Valade, Service de Neurochirurgien Hôpital Pitié-Salpêtrière, Paris

Le traitement de la crise migraineuse repose actuellement sur les anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS) et les triptans qui sont les deux seules classes pharmacologiques dont l’efficacité thérapeutique a été démontrée avec un haut niveau de preuve dans cette indication.  Ces deux classes pharmacologiques ne couvrent cependant pas tous les besoins thérapeutiques des migraineux. Deux programmes de développement clinique méritent une attention particulière et concernent les antagonistes des récepteurs du CGRP et les agonistes des récepteurs 5-HTf.

L’approche prophylactique est un élément capital du traitement de la migraine épisodique qui concerne plus d’un tiers des migraineux. Actuellement, cette approche prophylactique est possible au travers de plusieurs traitements pharmacologiques ayant un bon niveau de preuve dans cette indication et  appartenant à diverses classes pharmacologiques : bêta-bloquants (propranolol, métoprolol), antiépileptiques (divalproate de sodium, topiramate, gabapentine), inhibiteurs calciques (flunarizine), antidépresseurs tricycliques et antagonistes sérotoninergiques (pizotifène). L’approche prophylactique peut également faire appel en seconde intention à des molécules mises plus récemment sur le marché, mais dont le niveau de preuve dans cette indication est plus faible : vérapamil, venlafaxine, lisinopril et candesartan. Enfin, il convient de ne pas oublier l’utilisation d’anciens traitements (oxétorone) toujours en usage dans certains pays (comme la France). Devant le manque de spécificité, de nouveaux médicaments émergent : les plus importants étant les anticorps monoclonaux antagonistes du calcitonin gene related peptide (CGRP) et de nombreux autres sont en phase I ou II de recherche tels que : les modulateurs de la fonction endothéliale, les antagonistes orexinergiques, l’ocytocine, les inhibiteurs non sélectifs des phosphodiestérases, les modulateurs des jonctions communicantes. Enfin, un futur plus lointain repose sur les neuropeptides hypothalamiques (PACAP, NPY), les inhibiteurs de la synthèse de l’oxyde nitrique (NO) et les canaux ioniques détecteurs d’acides (ASIC).

The actual treatment of migraine attacks is triptans and NSAIDs, but CGRP has emerged as a key neuropeptide target for migraine therapy,despite an off target class effect on liver enzymes, two molecules antagonists(ubrogepant and rimegepant) remain in development with also a 5HT1f (lasmiditan) without cardiovascular contraindications that limit the utility of the triptans

But if we have an excessive use of acute medication with the risk of medication overuse prophylactic therapeutics are the best choice, If actually the monoclonal antibodies antagonist of CGRP are on the market all over the world but not in France, The research is very active in different directions like hypothalamic neuropeptides because the hypothalamus hosts many key neuropeptide systems that postulate to play a role in the mirgraine’s physiopathology. These neuropeptides inlude orexins, oxytocin, neuropeptide Y (NPY) and pituitary adenylate cyclase activating protein (PACAP) but others ways are  also nitric oxyde synthase inhibitors and acid-sensing ion channel therapies (ASICs)

« Inhibiteurs sélectifs des tumeurs porteuses d’un transcrit NTRK : un changement de paradigme dans le traitement des tumeurs de l’enfant et de l’adulte »

Dr Daniel Orbach, Pédiatre oncologue, Centre oncologique SIREDO (Soins, Innovations, Recherche contre les cancers de l’enfant, l’adolescent et le jeune adulte), PSL université, Institut Curie

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Diapositives présentées

Dans des conditions physiologiques normales, les gènes NTRK forment une famille de 3 proto-oncogènes (NTRK1, NTRK2 et NTRK3) codant respectivement pour les protéines transmembranaires TRKA, TRKB et TRKC (Tropomyosin Receptor Kinase). Les récepteurs TRK sont exprimés préférentiellement dans le système nerveux et interviennent dans la régulation de la douleur (TRKA), la régulation de la mémoire et du poids (TRKB) et la proprioception (TRKC) par la fixation de ligands spécifiques à chaque récepteur. La fusion de gènes impliquant des gènes NTRK conduisant à la transcription de protéines de fusion TRK aberrantes avec un fort potentiel oncogène.

Depuis plusieurs décennies, des tumeurs malignes portant un transcrit de fusion NTRK ont été décrites. Initialement, cette fusion était fortement associée au gène ETV6 (transcrit ETV6-NTRK3) et principalement décrite alors dans le fibrosarcome infantile (IFS). Progressivement, ce transcrit de fusion « spécifique » a également été découvert dans d'autres tumeurs comme le néphrome mésoblastique hypercellulaire, le carcinome des glandes salivaires (carcinome sécrétoire mammaire des glandes salivaires, MASC) ou le carcinome sécrétant du sein. Dans ces tumeurs, la présence de cette translocation est aussi considérée comme très fréquente et reste un outil important pour aider au diagnostic (par FISH, RT-PCR ou RNAseq). En outre, il a été aussi établi que des fusions impliquant d'autres partenaires (tels que EML4-NTRK3, TMP3-NTRK1, LMNA-NTRK1, SCYL3-NTRK1, moins fréquemment en cause), étaient aussi associées aux gènes de la famille NTRK dans d'autres tumeurs malignes et parfois bénignes ce qui conduit à considérer qu’à l’heure actuelle la prévalence approximative des transcrits de fusion NTRK pourrait être d'environ 0,5-1 % dans certaines tumeurs malignes ou de malignité intermédiaire chez l’homme.

Les récents développements cliniques de cette nouvelle classe de composés bloquant la voie moléculaire NTRK, qui font actuellement l’objet d’investigations cliniques précoces, ont montré une réelle efficacité de ces nouveaux médicaments (larotrectinib, crizotinib, entrectinib) avec peu d’effets secondaires laissant augurer d’une utilisation plus large de ces molécules dans ces maladies à l’avenir quel que soit le type histologique ou le tissu d’origine de la tumeur en ne tenant désormais plus compte que de la présence ou non de cette anomalie moléculaire en somatique.

Since several decades, malignant tumors harboring a NTRK fusion transcript (Neurotrophic receptor tyrosine kinase) have been described. Initially, this fusion was highly associated to ETV6 (NTRK–ETV6) and mainly described in infantile fibrosarcoma (IFS), hypercellular mesoblastic nephroma, some salivary gland carcinoma or secretory breast carcinoma. Moreover, other partners have been less frequently founded to be associated to NTRK gene in other malignant tumors leading to consider that nowadays approximately the prevalence of the NTRK fusions transcript could be present in some more common tumors up to 0.5-1%. The recent clinical developments of a new class of compounds blocking the NTRK molecular pathway, which are still currently under early clinical investigation, give an important hope to find a specific new way to treat patients with these tumors. First results showed an important efficacy of these new drugs (larotrectinib, crizotinib, entrectinib) who are a perfect model of what is excepted for target therapies. 

 

Séance non publique

Clôture par la Présidente, Christiane Garbay

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