Séance académique



Compte rendu et diapositives présentées

 Séance académique

Mercredi 13 février 2019

Compte rendu

 

 

1- Activités administratives de l’Académie

Approbation du compte rendu de la séance du 5 décembre 2018 (document disponible sur le site de l’AnP), adopté à l’unanimité.

Informations de la Présidente

  • Décès de notre collègue Jean Tronchet, survenu le 29 janvier 2019.
  • Rappel : la séance délocalisée aura lieu à Caen, les 17 et 18 mai prochain.
  • Une discussion ouverte d’environ 30 minutes aura lieu en début de séance le 13 mars prochain sur le thème de la maladie rénale, animée par Daniel Vasmant.
  • Appel à publication pour les Annales.
  • Augmenter les participations à la Lettre Scientifique.

Lecture de la correspondance et informations du Secrétaire Perpétuel

  • Notre collègue, Denis Jordan, membre correspondant étranger, vient d’être élu Président de la FIP.
  • Nous avons reçu, le 12 février, la visite de Georges Griffin, Président de la FEAM, et Laurence Legros, Directrice.
  • Annonces de la parution de recommandations :
    • « Compléments alimentaires contenant des plantes » ;
    • « Prévention des cancers dus au papillomavirus humain » ;
  • Annonces de recommandations à venir :
    • « Résistance aux antibiotiques. Des pistes insuffisamment explorées » ;
    • « Maladie rénale chronique : prévention des risques de iatrogénies médicamenteuses et dépistage de la maladie ».

2- Travaux scientifiques & professionnels

2.1 Exposés

« Criblage de la biodiversité pour la découverte de médicaments »

Alexandre Gabibov, Directeur de l’Institut Shemyakin & Ovchinnikov de chimie bioorganique, chef du Laboratoire de Biocatalysis de l’ Académie des Sciences de Russie, membre de l’Académie nationale de Pharmacie

La chimie et la biologie combinatoires sont devenues une caractéristique des sciences de la vie au XXIeme siècle. Nous avons développé des approches microfluidiques pour le criblage du microbiote, de clones biocatalytiques, de la diversité des anticorps et de récepteurs d'antigènes chimériques spécifiques (CARs). Dans cet exposé, nous rapportons nos travaux concernant le développement d'une nouvelle plateforme pour améliorer de manière significative l'efficacité et la sécurité du traitement du lymphome folliculaire. Nous utilisons la sélection combinatoire autocrine pour identifier rapidement des ligands spécifiques des récepteurs des cellules B à la surface des cellules tumorales FL. Les ligands sélectionnés sont utilisés dans un format CART pour la redirection des lymphocytes T cytotoxic humains. Ce format est essentiellement l'inverse du protocole CART habituel. Les techniques de criblage à très haut débit peuvent identifier une fonctionnalité unique parmi des millions de variants. Afin de reproduire les mécanismes naturels de sélection qui se produisent in vivo par compartimentation, la technique que nous avons développée est basée sur l’encapsulation monocellulaire dans des gouttelettes d’une émulsion microfluidique double eau-dans-l’huile monodispersée. La combinaison de la machinerie génératrice des gouttelettes et de la technologie FACS suivie du séquençage de la génération suivante et de l'analyse par spectrométrie de masse couplée à la chromatographie en phase liquide des sécrétomes des cellules encapsulées, nous a fourni des descriptions détaillées des génotypes/phénotypes. Cette plateforme a été également testée pour le criblage à ultra-haut débit de biocatalyseurs ancrés à des cellules de levure, et ceci, avec un enrichissement proche de la limite calculée théoriquement; elle a été utilisée aussi pour l’étude des interactions cellule-cellule. La polyvalence de la plateforme a permis l'identification de bactéries, en particulier celles du microbiote oral à croissance lente qui inhibent la croissance d'agents pathogènes communs. Nous avons enfin développé une nouvelle plateforme pour la maturation d'd'anticorps conçus in silico. Ainsi, la sélection in vitro d'anticorps à partir de grands répertoires de sites de combinaison d'immunoglobuline à l'aide de banques combinatoires constitue un outil puissant, offrant notamment un grand potentiel pour générer des épurateurs de toxiques fonctionnels in vivo. Des calculs de mécanique quantique/mécanique moléculaire (QM/MM) ont permis d’atteindre la maturation in silico de ces pièges macromoléculaires.

Questions - Réponses - Commentaires

Christiane Garbay (Q) : vous mettez en place des cribles in silico de molécules virtuelles à l’aide de banques combinatoires avec la méthode QM/MM à partir de sites de reconnaissance d'immunoglobuline pour des cribles ultérieurs dirigés in vitro puis in vivo. Pouvez-vous nous parler de l’approche de modélisation moléculaire et nous dire combien de temps il vous faut pour obtenir des résultats ?

(R) : il s’agit d’une nouvelle plateforme pour la maturation d'anticorps conçus in silico à partir de grands répertoires de sites de combinaison d'immunoglobuline pour une meilleure sélection. Les premiers algorithmes nécessitaient six mois de calculs. Ce temps est actuellement réduit à trois mois par l’utilisation d’algorithmes plus rapides pour un coût cependant plus élevé.

Christiane Garbay (Q) : pour le traitement du lymphome folliculaire vous utilisez une plateforme afin de sélectionner des ligands spécifiques des récepteurs des cellules B à la surface des cellules tumorales. Comment avez-vous construit votre bibliothèque de cyclopeptides et pourquoi ces peptides sont-ils cycliques ?

(R) : elle a été créée en procédant au screening des cellules des patients avec les fragments de la partie variable de la chaîne simple d’anticorps puis en fabriquant le CAR (chimeric antigen receptor) correspondant (inverse du protocole CART habituel). Ces peptides sont cycliques pour garantir leur solidité enzymatique. Aujourd’hui, on n’a plus le droit d’utiliser ce système et on travaille sur la souris. On a pris un brevet.

« Diagnostic génétique sur l’embryon humain pré-implantatoire : pratiques, perspectives et limites »

Nelly Frydman, Unité Fonctionnelle de Biologie de la Reproduction. Faculté de Médecine, Université Paris-Saclay, Hôpital Antoine Béclère Clamart F-92140, France

La loi de Bioéthique (LBE) du 29 juillet 1994 « relative au don et à l’utilisation des éléments et produits du corps humain, à l’assistance médicale à la procréation et au diagnostic prénatal a autorisé à « titre exceptionnel » la pratique du diagnostic génétique pré-implantatoire (DPI). Ce diagnostic est indiqué pour éviter la transmission d’une maladie génétique ou chromosomique reconnue d’une particulière gravité pour l’enfant à naître et incurable au moment du diagnostic. En pratique, il est réalisable lorsque l’un des deux membres du couple ou les deux membres du couple sont porteurs soit d’un remaniement chromosomique de structure ou d’une anomalie de nombre des chromosomes ou s’il y a risque de transmettre une maladie monogénique. Le diagnostic génétique requiert un prélèvement d’embryon, celui-ci peut être pratiqué à différents stades du développement pré-implantatoire. Une fois le diagnostic établit l’embryon indemne de la pathologie est transféré dans l’utérus maternel. Le DPI permet donc aux couples d’éviter d’avoir recours à l’expérience douloureuse et traumatisante de l’interruption médicale de grossesse. En cas de diagnostic pré natal défavorable.

Pour les couples infertiles obtenant une grossesse par FIV, le diagnostic génétique pré-implantatoire des aneuploïdies (DPI-A) pourrait également éviter la survenue de pertes fœtales précoces ou tardives ou la naissance d’un enfant atteint d’une maladie congénitale pour laquelle il existe une indication d’IMG. Ce diagnostic consiste à effectuer un diagnostic d’aneuploïdies sur des embryons issus de fécondation in vitro. Son objectif est de permettre le transfert d’un embryon au potentiel évolutif plus élevé car non porteur d’aneuploïdie, d’éviter la survenue de fausse couche ou le recours au diagnostic prénatal qui pourrait aboutir à discuter une IMG. Le DPI-A est interdit sur notre territoire car le législateur n’était pas convaincu du bénéfice qu’il pouvait apporter d’une part aux couples infertiles et d’autre part à notre collectivité. Cette interdiction était compréhensible dans le passé car l’effet bénéfique du DPI-A était controversé dans la littérature scientifique disponible sur le sujet. Or, depuis plusieurs années, des innovations technologiques en génétique (possibilité d’analyser l’ensemble des chromosomes sur quelques cellules) et en biologie de la reproduction (biopsie plus tardive au stade de blastocyste et mise en place de la vitrification) devraient conduire à une réévaluation de la balance bénéfice/risque que ce diagnostic apporterait aux couples infertiles.

Questions - Réponses - Commentaires

Jean-Claude Chaumeil (Q) : quel est le motif qui conduit les parents à demander un diagnostic pré-implantatoire ? La naissance d’un premier enfant avec une anomalie relève-t-elle de ce diagnostic ?

(R) : en France, il n’y a pas encore de dépistage pré-conceptionnel. Il faut que le couple ait un premier enfant malade pour consulter un généticien. Ces points ont largement été discutés au cours des auditions pour la révision de la Loi de Bioéthique car certains souhaitent un libre accès au dépistage d’un panel des maladies les plus fréquentes.

Jean-Claude Chaumeil (Q) : cela nécessite donc un recours à la fécondation in vitro (FIV) ?

(R) : c’est obligatoire. Les couples qui ont connu une interruption médicale de grossesse préfèrent la FIV.

Monique Pateloup (Q) : il y a une vingtaine d’année lors du congrès Euromédecine qui se tenait à Montpellier, le Ministre de la Santé Jean-François MATTEI avait participé à un débat sur la protection juridique et psychologique de l’embryon congelé. Pouvez-vous nous préciser si des moyens ont été mis en commun pour évaluer des différents points ? Sur le plan de la recherche, avez-vous créé des groupements internationaux d’intérêts économiques ?

(R) : le suivi de l’état de santé des enfants issus d’embryons congelés est rassurant et il n’y a pas plus de problème que chez des enfants issus de l’Assistance Médicale à la Procréation (AMP) à transfert immédiat sans congélation d’embryon. En cas de recours à l’AMP, il a globalement un peu plus d’anomalies non graves et de complications chez les enfants et les grossesses sont un peu plus difficiles. Il existe beaucoup de sociétés savantes nationales et internationales. Les systèmes de santé sont cependant différents d’un pays à l’autre, le nôtre étant fondé sur la solidarité nationale. Ainsi, certaines techniques sont plus facilement autorisées à l’étranger car le questionnement éthique est plus secondaire puisque le problème du coût pour la collectivité ne se pose pas. Concernant le taux de succès et le coût de ces techniques, nous menons une étude de l’impact économique de la recherche d’aneuploïdie en raison du coût élevé d’une AMP surtout si elle conduit à une fausse couche. Nous congelons aussi beaucoup d’embryons dont 70 % ne vont pas s’implanter. Il faut trouver un modèle économique qui permettra de rajouter ce diagnostic mais qui n’autorisera plus de rembourser autant de tentatives d’implantation.

Christiane Garbay (Q) : avez-vous eu un retour de Jean-Louis Touraine, rapporteur de la mission d’information sur la Loi de Bioéthique au sujet du diagnostic pré-implantatoire ?

(R) : j’ai été auditionnée, mais je n’ai pas encore eu de retour à ce jour. Par ailleurs, il semblerait qu’un autre groupe se constitue au Sénat pour de nouvelles auditions. Les conclusions sur ce sujet ne seront pas connues avant septembre.

Christiane Garbay (Q) : qu’en est-il de l’accès aux généticiens qui devaient être beaucoup plus nombreux ?

(R) : il était question de permettre aux conseillers en génétiques, qui n’ont pas de formation médicale, le droit de faire des consultations et des prescriptions ce à quoi je ne suis personnellement pas favorable.

« Le secteur de la pharmacie au Maroc »

Yahya Cherrah, Professeur de l’enseignement supérieur, Faculté de médecine et de Pharmacie de Rabat, Maroc

Le secteur de la pharmacie au Maroc s’est développé de manière régulière depuis les années soixante, avec la mise en place d’une réglementation rigoureuse en faveur du monopole du pharmacien, ce qui évite au pays la circulation de faux médicaments.

L’importance a été donné à l’encouragement d’une fabrication nationale des médicaments avec actuellement une quarantaine de laboratoires pharmaceutiques et un taux de production de 70 % de la consommation.

Le réseau des pharmacies d’officine couvre la totalité du territoire avec 10.000 officines.

Quant au secteur de biologie clinique, il est encore un peu en retrait, mais progresse favorablement.

Pour la formation des pharmaciens, jusqu’en 1987 la totalité ont été formé à l’étranger, en particulier en France. Actuellement, le Maroc dispose de quatre facultés de pharmacie.

Questions - Réponses - Commentaires

Jean-Claude Chaumeil (Q) : quels sont les étudiants autorisés à intégrer la troisième année ?

(R) : 20 % des étudiants ayant obtenu un DEUG sont autorisés à intégrer la troisième année par un système de passerelle.

Jean-Claude Chaumeil (Q) : quelle est la part de la population prise en charge par l’assurance maladie ?

(R) : 40 % de la population est à ce jour prise en charge par l’assurance maladie. Onze millions d’indépendants et huit millions de patients démunis vont être intégrés ce qui permettra d’atteindre 60 % de la population à fin 2019.

Jean-Claude Chaumeil (Q) : cela va mécaniquement augmenter le revenu des pharmaciens

(R) : le revenu des pharmaciens devrait automatiquement augmenter, mais les 11.000 officines actuelles devraient suffire.

Bruno Bonnemain (Q) : y a-t-il des pharmaciens responsables, avec des profils de Directeurs Généraux Adjoints, dans l’industrie pharmaceutique comme en France ?

(R) : exactement comme en France.

 

Patrick Couvreur (Q) : quel est le taux d’emploi de vos étudiants en pharmacie à l’issue de leurs études ?

(R) : 60 % des jeunes diplômés vont en officine, mais pourquoi sommes-nous arrivés à une saturation ? Au début des années 2000, beaucoup d’étudiants sont partis dans les pays de l’est, ce qui a généré un afflux de jeunes pharmaciens en plus de ceux formés localement et admis selon un numerus clausus. Actuellement l’industrie recrute beaucoup ainsi que l’hôpital qui avait un certain retard.

Christiane Garbay (Q) : effectuez-vous de la recherche dans les facultés ?

(R) : oui, dans les mêmes matières que les facultés Françaises puisque nos enseignants y ont été formés.

Liliane Grangeot-Keros (Q) : les vaccins sont-ils gratuits ou remboursés et qu’en est-il du vaccin contre le papillomavirus ?

(R) : les vaccins sont remboursés et le Ministère a un plan de vaccination annuel gratuit. La fondation contre le cancer Lalla SALMA a vacciné gratuitement contre le papillomavirus. À ce jour, seules les filles sont vaccinées.

Nelly Frydman (Q) : comme en France, 10 à 15 % des couples en âge de procréer sont infertiles. Je crois savoir que la gynécologie est bien développée, mais qu’en est-il des laboratoires et de l’enseignement dans le domaine de la FIV ?

(R) : il y a actuellement une dizaine de laboratoires (privés ou publics) dans ce domaine et il existe un Diplôme Universitaire dans mon université. Une loi relative à l’encadrement de ces pratiques dans les laboratoires est d’ailleurs en cours de finalisation au niveau du Parlement.

Philippe Liebermann (Q) : vous avez évoqué la saturation des officines mais qu’en est-il des pharmaciens assistants et de la formation du personnel travaillant dans ces officines ?

(R) : la Loi de 2006 impose le recrutement d’un pharmacien assistant à partir d’un certain chiffre d’affaire (1 million de Dirhams). Les pharmaciens titulaires n’ont pas l’obligation de recruter des préparateurs en pharmacie. Leur personnel était traditionnellement des vendeurs formés sur le tas. L’école régie par le Ministère de la Santé a vocation à former les préparateurs pour les hôpitaux. Plusieurs écoles privées forment maintenant des préparateurs parmi lesquels les pharmaciens titulaires sont encouragés à recruter.

Monique Adolphe (Q) : avez-vous réglé le problème des médicaments falsifiés au Maroc ?

(R) : le Laboratoire national de Contrôle créé en 1973 et le circuit pharmaceutique mis en place nous préservent des médicaments falsifiés, au niveau des villes frontières. Nous avons été confrontés à de la contrebande à petite échelle de vrais médicaments avec des vignettes provenant de France ou d’Espagne. Par ailleurs, la mise en place des pharmaciens responsables dans l’industrie pharmaceutique nous apporte une garantie supplémentaire dans ce domaine

Jean-Pierre Lousson (Q) : quel est le nombre d’habitants au Maroc et qui sont ces 11 millions d’indépendants ?

(R) : Il y a actuellement 34 millions d’habitants et les indépendants sont tous ceux qui ne sont pas fonctionnaires.

2.2 Communications (10 min)

« Recherche de cibles thérapeutiques dans les tumeurs malignes des gaines nerveuses associées à la neurofibromatose de type 1 par crible génétique CRISPR Cas9 d’essentialité »

Éric Pasmant, présenté par la 3ème section

Questions - Réponses - Commentaires

Christiane Garbay (Q) : la neurofibromatose de type 1 n’est-elle pas le nom scientifique d’Elephant man ?

(R) : c’est plus proche de Quasimodo que d’Elephant Man, qui est le syndrome de Protée.

Claude Monneret (Q) : effectuez-vous le criblage pharmacologique sur l’ensemble de la chimiothèque ou sur un type particulier ? En quoi consiste le traitement de cette pathologie ?

(R) : nous avons testé la librairie épigénétique ainsi que tous les inhibiteurs de type kinase et les thérapies ciblées en cours de développement qui représentent 200 à 300 molécules. Malheureusement, aucun traitement n’est efficace mais des essais cliniques utilisant des inhibiteurs d’histone désacétylase (HDACi) sont actuellement en cours.

Christiane Garbay (Q) : je profite de cette occasion pour rappeler que la chimiothèque Prestwick a été créée en 1999 par Camille G. Wermuth, qui était pharmacien à la Faculté de Strasbourg. Pouvez-vous nous préciser ce qu’est exactement le PRC2 (Polycomb Repressiv Complexe 2) ?

(R) : l’ADN est enroulé autour d’histone,s qui sont des protéines basiques qui vont permettre la compaction/décompaction et moduler la transcription des gènes. Le PRC2 fait partie de ces complexes qui peuvent apposer des modifications post-traductionnelles, notamment de la queue terminale de ces protéines et en particulier le PRC2 appose une mono-di ou tri-méthylation de la lysine 27 de l’histone 3. La méthylation de ces histones est un signal en général associé au maintien de la répression transcriptionnelle ce qui conduit au verrouillage de la transcription de l’ADN.

 

 

 

 

« Nomenclature et classification des dispositifs médicaux : définition et enjeux »

Maurice Ventura, Président de l’Association pour la classification des dispositifs médicaux et autres produits de santé, présenté par la 4ème section

Distinguer les concepts de nomenclature et classification n’est pas toujours aisé. Ces deux termes sont souvent employés indifféremment pour parler de regroupements d’objets ou de partition d’un ensemble d’objets.

En pratique, il convient de bien les distinguer car ils répondent à des objectifs distincts et auront des applications distinctes dans le processus de gestion des dispositifs médicaux.

La nomenclature est la terminologie de référence qui définit les types de dispositifs médicaux.  Ces types correspondent à des regroupements d’un ensemble de DM considérés comme équivalents (ensemble d’objets qui remplissent des fonctions semblables ou équivalentes ou qui ont des caractéristiques communes). Tout dispositif médical est rattaché à un des termes de la nomenclature (avec un code et une définition) permettant sa reconnaissance sans aucune ambigüité. L’enjeu pour une nomenclature est la sécurisation des échanges de données, notamment entre les agences sanitaires et les fournisseurs, en permettant la reconnaissance du type de DM.

La nomenclature de référence est la GMDN. Elle devrait être la nomenclature choisie pour la base réglementaire européenne EUDAMED.

Une classification est une distribution d’objets par classes, par catégories, constituées d’éléments de plus en plus semblables, selon un ordre et une certaine méthode, en fonction de critères hiérarchisés. Une classification répond à un objectif défini. Les classifications ont un double enjeu :

  • avoir une structure hiérarchique suffisamment explicite pour faciliter les recherches ;
  • définir des niveaux d’agrégat cohérents avec les besoins d’analyse des utilisateurs.

Quatre classifications des dispositifs médicaux coexistent. Elles ont pour objectifs l’analyse des transactions commerciales, la facilitation des échanges électroniques, l’enregistrement réglementaire des DM ou le classement en fonction des indications et des usages.

Questions - Réponses - Commentaires

Jean-Michel Descoutures (Q) : la nomenclature GMDN est internationale et plutôt anglo-saxonne (américaine) et payante ce qui pose le problème de son financement. En revanche, les classifications semblent être plutôt nationales. Que veut l’Europe dans le domaine de la réforme sur les dispositifs médicaux et va-t-on vers une homogénéisation européenne ?

(R) :  il semblerait que la GMDN soit la nomenclature retenue par la base européenne EUDAMED qui va répertorier tous les dispositifs médicaux et elle cessera ainsi d’être payante puisqu’elle sera obligatoire et que tous les laboratoires devront y avoir accès. Je précise qu’elle est actuellement traduite en 25 langues européennes. Les classifications sont effectivement plutôt nationales même si CLADIMED est utilisée en Belgique et au Luxembourg.

Jean-Michel Descoutures (C) : la classification ATC est largement utilisée pour les médicaments et je trouve dommage que l’Europe ne réfléchisse pas à une nomenclature internationale.

(R) : l’OMS est en train de bâtir de classification/nomenclature pour son usage et notamment pour les situations d’urgence. Il est possible que ce travail soit mis à profit pour la constitution d’une nomenclature internationale.

Jean-Claude Chaumeil (Q) : existe-t-il des normes AFNOR ou CEN (Comité Européen de Normalisation) pour substituer des dispositifs médicaux par d’autres ?

(R) : rien n’existe dans le domaine des dispositifs médicaux.

Agnès Artiges (Q) : pourquoi notre système n’est-il pas proposé au niveau européen ?

(R) : la commission européenne a répondu qu’elle ne s’intéressait pas aux expériences locales lorsque la classification CLADIMED y a été proposée il y a quelques années. Tous les efforts ont depuis été concentrés sur la constitution d’une nomenclature. Par ailleurs, il faudra ensuite traduire dans 25 langues la classification retenue, ce qui est très compliqué.

« Environnements virtuels 3D immersifs et jeux sérieux - Intérêts en pédagogie, exemple de Pharma 3D »

Pascal Wehrlé, Faculté de Pharmacie, Université de Strasbourg, présenté par la 4ème section

De nombreux chercheurs et enseignants partagent le constat d’une évolution des étudiants dans leur participation à leur formation ainsi que de difficultés croissantes à enseigner. La translittératie qui promeut l’interaction par le biais d'une variété de plateformes, d'outils et de moyens de communication apparaît comme une approche adaptée à cette évolution. Les environnements virtuels 3D immersifs constituent un de ces moyens. Après un bref rappel historique et la définition de concepts tels que réalité virtuelle, jeu de rôle et monde virtuel immersif, les principaux avantages dans le domaine de la pédagogie et de l’apprentissage sont exposés puis illustrés à l’aide du « métavers » Pharma 3D. Chacun peut s’y rendre depuis son ordinateur avec son avatar. Le professeur et ses étudiants peuvent par exemple y travailler et parler ensemble, à distance. Ce monde virtuel de la pharmacie offre plusieurs espaces pédagogiques : une pharmacie d’officine conforme aux recommandations de l’Ordre des pharmaciens, plusieurs jeux de rôle permettant de s’entrainer à la dispensation d’ordonnances et ou à des activités en orthopédie. Pharma 3D contient une vidéothèque et des ressources qui concernent l’officine mais également le monde industriel (Pharma Industry 3D). Les avatars peuvent  « se détendre » dans une zone engazonnée tout en regardant les posters primés dans le cadre du concours national communication de santé publique. Ils peuvent se téléporter vers ChampiGo et apprendre à reconnaître les champignons. Parmi d’autres fonctionnalités, on peut citer une pharmacie du futur en construction, PharmAgora3D offrant six étages d’exposition et le « kiosque » qui réunit des ressources internet sélectionnées pour les étudiants. Un des éléments « cliquables » du kiosque renvoie au dictionnaire encyclopédique et électronique de l’Académie nationale de Pharmacie.

Questions - Réponses - Commentaires

Michel Plotkine (Q) : a-t-on comparé l’efficacité de ces méthodes pédagogiques virtuelles avec les méthodes classiques sur le principe de l’Évidence Based Pedagogy ?

(R) : je présume que oui même si je n’ai pas d’éléments chiffrés. Les jeunes ont changé et nous devons diversifier nos modes éducatifs. Dans ma pratique quotidienne d’enseignant, j’utilise tous les moyens pour capter l’attention de mes étudiants (boitiers, quizz…)..

Jean-Claude Chaumeil (Q) : plusieurs expérimentations avec des smartphones ont montré un engouement initial puis un épuisement progressif. Quelle est la part de ce mode d’enseignement par rapport à l’enseignement traditionnel et se prête-t-il à tous les types d’enseignements ?

(R) : à partir du moment où il y a une activité d’apprentissage d’un acte technique, les environnements virtuels sont un bon moyen pour s’entrainer. La volonté de la faculté de Strasbourg est de généraliser l’utilisation de ces méthodes pédagogiques.

Philippe Liebermann (Q) : ce produit peut-il être utilisé dans la formation continue des professionnels, pharmaciens d’officine et leurs équipes ?

(R) : l’outil est déjà adapté pour la formation continue puisqu’un module destiné à un diplôme universitaire d’orthopédie a été développé. Pharma 3D peut être utilisé par les étudiants et les professionnels. Il faut préalablement rendre l’outil plus fluide pour le déployer à la formation continue des équipes officinales.

Michel Plotkine (Q) : l’outil est-il accessible à tous et y a-t-il un risque de saturation ?

(R) : Pharma 3D est accessible à tous. Il s’agit d’un monde virtuel mais aussi une page internet qui permet d’accéder à un tutoriel pour la création de son avatar. Un phénomène de saturation est possible en cas de consultation trop importante de visiteurs occasionnels.

Christiane Garbay (Q) : avez-vous envisagé son utilisation à l’hôpital et est-ce transférable dans les lycées ou les salons pour promouvoir les études de pharmacie ?

(R) : c’est possible, mais ça n’a pas été développé pour.

Liliane Grangeot-Keros (Q) : des expériences similaires existent à l’étranger et notamment au Canada. Sont-elles accessibles à nos étudiants ?

(R) : l’université de Laval propose des accès. Les universités anglo-saxonnes, américaines en particulier, proposent des accès payants ou l’utilisation de MOOC (Massive Open Online Courses = cours d'enseignement diffusé sur Internet) gratuits.

 

Clôture par la Présidente, Christiane Garbay

 

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